Je suis là, seule, sur le vaisseau Terre. Pas vraiment seule, non, il y a plein de monde, des foules entières autour de moi, mais absentes, ignorantes. Je cherche des compatriotes, des compagnons de route, ils doivent bien exister, perdus eux aussi au milieu des foules. Je cherche la conscience, ceux qui savent que nous sommes tous embarqués sur le même navire, cette Terre bleue qui voyage dans les galaxies. Il y a comme un sentiment d’urgence, vite, créer un équipage, plusieurs équipages même, à chaque bout de la terre, et comme est elle est ronde …
Serait-il possible que livrée à elle-même et à ses inhospitaliers habitants, la terre perde le Nord ? Plus de boussole pour accomplir son parcours ? Où va-t-elle ? Serait-il possible que la terre, en train de tourner sur elle-même, avance à l’aveuglette ? Serait-il possible qu’elle se soit perdue dans un système solaire inadapté et qu’elle tourne, tourne en rond pour tenter de sortir ?
Nous sommes peut-être largués dans une galaxie de l’oubli, depuis des siècles et des siècles, nous sommes sans mémoire, égarés. Nous pouvons rester là encore des siècles jusqu’à une mort certaine, un épuisement du soleil, un astéroïde un peu trop gros ou une extinction des humains, de la vie, dans une tuerie générale.
Vite, retrouver le gouvernail, où se cache t-il ? A moins que le vaisseau soit téléguidé et quoiqu’il arrive, il parcourt son chemin. Mais s’il arrive vide, vidé de toute vie, quel intérêt ? Et si le téléguidage était brouillé ? Alors, il faut trouver le cœur, ôter les brouillards, rallumer les lumières, et allez en route !
Le sentiment de solitude doit laisser place au sentiment solidaire, un chœur à l’unisson, vaillant, pour accomplir le chemin. Nous sommes prêts à sortir de l’oubli et si près de l’issue, la sortie de secours se présente à nous, on devine le passage, si proche. Urgence, ne pas rater la porte, sous peine de repartir pour des siècles de solitude, d’oubli, prisonniers tournant en rond sous un ciel grillagé.
C’est peut-être jour de chance, et à ceux qui veulent laisser passer l’opportunité, je dis : “Vous êtes déjà morts !”