[attention post éminemment intuitif, intérieur, du domaine de l’impalpable et du presque inconnaissable]

Avec le nombre impressionnant de témoignages d’agressions sexuelles des hommes envers les femmes depuis plusieurs jours, quelque chose tente de se montrer. Car fallait-il être bien aveugle pour ne pas savoir ce qu’endurent les femmes et quelques hommes aux caractères dits efféminés et des enfants sans défense, tout ce qui est considéré comme faible, doux, émotionnel, opposé à la virilité, à la puissance, à la domination, depuis des siècles et des siècles. Et dans les guerres, humilier, violer des femmes, violer des hommes, violer des enfants, torturer, tuer. Je crois que nous sommes toutes et tous inconscients de ce qu’il se joue en réalité dans ces #metoo et #moiaussi et #balancetonporc. Quelque chose des profondeurs, quelque chose des souterrains, quelque chose des ombres, essaie de s’extirper enfin.

Saurons-nous le voir, en faire une opportunité ? Car, avec cette prise de parole mondiale des femmes, la racine de la violence tente là de voir le jour.

Comment donc, allez-vous dire, ce n’est qu’une émotion collective exprimée en masse, légitime pour la plupart, illégitime pour quelques uns des plus réactionnaires, que les réseaux Internet permettent. Et bien, oui, dans un sens, mais si nous savons voir à travers les projections, c’est à dire à travers ce que nous projetons de nos mondes intérieurs, mondes cadenassés et invisibles pour la plupart des humains, nous pouvons y voir toute autre chose, nous pouvons y voir, une nouvelle puissance de renaissance qui va jaillir, nous avons là le germe.

Ce que nous qualifions de masculin, féminin, hormis le sexe physique, est bien souvent erroné. Nous ne savons pas ce qu’est exactement cette opposition, cette dualité, engloutie par cette longue histoire humaine des émotions, des sentiments et des catégories.

Nous nous pensons en projection dans le monde, différenciés, recherchant chacun sa moitié mâle ou femelle. Mais dans mon intuition profonde, je crois que nous humains, nous sommes tous mâles à l’intérieur. Nous n’avons pas encore trouvé cette part femelle en nous. Et pour ceux et celles qui l’ont trouvé, reste encore à l’épouser et à mutuellement nous féconder, pour faire naître en nous, notre neuve humanité.

Ce sont les femmes aujourd’hui qui courageusement osent dire, parce qu’elles portent en elles les stigmates les plus douloureuses et les plus visibles. Elles savent, même inconsciemment, qu’elles ne peuvent plus continuer à se taire, ou bien la souffrance enfouie et cachée, mais bien là, va venir exploser dans le monde, envers elles et envers l’humanité toute entière. C’est cela même qui tente de parler aujourd’hui, cette part enfouie, cachée, méprisée, humiliée, piétinée, violée, tuée.

La plupart des hommes ont tellement de difficultés à dire le mal que l’on leur a fait. La souffrance qu’on leur inflige pour générer la souffrance. Le mal qu’on leur inflige pour rester indigne. Et dire le mal qu’ils font en eux et autour d’eux.

Jusqu’à présent et à des exceptions près, cette part, ne pouvant pas se dire, se manifeste à l’extérieur par cette funeste violence humaine. Elle rugit en silence, tapie au fond de nous, monstre intérieur, et se projette dans le monde en assassinant les esprits et les corps. Cette ombre en nous que nous ne voulons pas voir, nous mène comme des marionnettes, elle nous fait nous haïr et haïr l’autre. Elle est tenue bien souvent par la morale, les lois et autres règles de société, que nous transgressons de temps en temps, quitte à être hors-la-loi, ou elle se déchaîne quand ceux qui sont au pouvoir politique décrètent les guerres, là, la loi permet le meurtre.

Mais cette ombre serait-elle si mauvaise, si horrible ? Serait-ce cela notre féminin en nous, cette horrible chose qui fait de nous des assassins par les paroles et les actes ?

Non. C’est une vieille croyance et cette croyance a fait un féminin répudié. Cette croyance a empêché l’émergence de notre moitié. Cette croyance nous a amputé, même si nous ne savons plus que c’est à cause de cette croyance. Nous avons oublié avoir cru cela, mais cette croyance a duré suffisamment de temps, pour avoir mis en place cette haine du féminin qui transpire partout dans le monde. Cette haine qui suinte et noie l’humanité, les animaux, les plantes et la terre. Nous sommes depuis tant de temps sous l’eau, qu’aujourd’hui nous avons besoin d’air pour nous transformer et pourquoi pas muter. Nous avons à engendrer notre métamorphose. Il est temps de sortir de la matrice.

Si nous ne pouvons pas savoir pourquoi nous avons été coupé en deux, avec une moitié oubliée, mis dans cette dualité terrestre avec ses multiples polarités et multiples réalités, nous pouvons et nous devons tenter de nous rejoindre. Si vraiment nous en avons assez des humiliations et des violences, des dominants et des dominés, alors le travail doit se faire. Nous devons nous mettre à l’œuvre, même dans le noir, même sans savoir encore ce qui va éclore. Commençons à allumer nos lanternes, même faiblement, à la découverte de cette ombrageuse part.

Si nous voulons être souverains, il n’y aura que l’épouse en nous qui pourra faire alliance avec notre mâle, il n’y aura qu’elle pour mettre au monde la vie d’un nouvel être, c’est à dire un humain entier et debout. Nous avons à nous accoucher par nous-mêmes de nous-mêmes.

Et pour faire surgir tout ce féminin indispensable en nous, nous n’avons pas d’autre choix que de nous coltiner avec l’ombre, avec ce truc enfoui, bien planqué, cette chose que nous ne voulons pas voir, cette souffrance en nous. Oui, en chacun, même chez le ou la bisounours la plus exquise de douceur et de gentillesse, il y a le mal en nous, enfin ce que nous appelons le mal. Il s’agit évidemment d’énergies occultées, recouvertes d’armures et de voiles, qui ne peuvent que se frayer un chemin par des failles pour se manifester dans des terribles violences contre nous-mêmes ou les autres. N’ayant pu être exprimées, à temps voulu, ces forces nous explosent à la figure.

Les religions nous ont fait justement beaucoup de mal en nommant le mal ces énergies et en nous poussant à les contraindre jusqu’à ce qu’elles s’effacent de notre mémoire pour ne laisser place qu’à ce mal extérieur où nous nous entre-tuons, et bien sûr personnifier ce mal, diable tentateur, dans la femme extérieure.

« Connais-toi toi-même et tu connaîtras l’univers et les dieux » était pourtant écrit sur la porte du temple de Delphes. Oh pas se connaître comme petite personne avec sa petite personnalité, son petit ego étriqué, petite pointe de l’iceberg. Non, se connaître entièrement en tant qu’humain horizontal et vertical. C’est difficile, on ne peut se connaître et s’aimer en trois jours, ou même une semaine, face à l’immense chantier de la reconnaissance du soi entier.

Il y a actuellement une recherche de masculin sacré et de féminin sacré, de dieux et de déesses que nous serions. Les hommes tentent de trouver cette part virile chevaleresque dénaturée et les femmes tentent de trouver cette part d’éternelle nature, mère d’abondance et d’amour, si tristement mise à mal. Quelle confusion ! Dans la pointe de l’iceberg de notre pauvre mental nous ne savons plus descendre en profondeur. Si nous descendions toutes et tous un petit peu, nous verrions que cette virilité nous est nécessaire, sans distinction de sexe, pour aller chercher cette douceur, sans distinction de sexe. Le travail est le même, femmes et hommes, pour être vertical, debout entre terre et ciel, dans notre dignité humaine, le travail est le même. Nous sommes dans l’illusion encore en séparant les sexes.

Cette déferlante de #metoo #moiaussi est une fulgurance qui nous arrive à la conscience. Ces femmes qui dénoncent font preuve là de beaucoup de virilité. Elles font surgir des mondes intérieurs, des projections qui nous illuminent, si nous savons voir. J’ose espérer que ce germe lancé à la face du monde, nous travaille toutes et tous en profondeur.

C’est drôle, je crois que ce que je viens de vous raconter, est tout simplement l’histoire de la belle au bois dormant. Nous ne pouvons pas échapper à toute la traversée de la forêt hérissée de piques, de ronces, peuplée de monstres, tailler dans le vif, trancher à vif, se blesser, se relever, continuer à marcher dans la nuit noire, faire flamber les bois morts, allumer sa lanterne, éclairer ce qu’il reste, s’adoucir au contact de la première clairière, s’abstenir des champignons empoisonnés, continuer sur le sentier qui commence à se dégager, quelques griffures encore, quelques ronces, mais le chemin devient de plus en plus clair et nous trouvons le royaume à l’intérieur duquel s’était assoupi depuis des siècles et des siècles la femme à épouser. Nous l’avions confondu avec le chemin à parcourir et c’est pourquoi, renâclant à la tâche, par ignorance, faiblesse, lâcheté, peur, nous l’avons enfouie sous des tonnes de haine et accuser de mille maux. Aujourd’hui les mots sortent par milliers pour dire qu’il est le moment de prendre la route de la forêt. Cela ne va pas être simple, il va y avoir des cris et des pleurs, il y en a déjà, mais cela vaut la peine. Avec bravoure et cœur, c’est à dire du courage, nous pouvons éclairer nos ombres, les voir sans crainte, dominer nos démons intérieurs, qui donnent tant de souffrance dans le monde, et avancer pour réveiller la princesse en nous qui attendait que nous soyons devenus princes, tout autant que nous sommes, femmes et hommes. La suite au prochain épisode, parce que les contes de fées s’arrêtent là, on sait juste qu’ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants, c’est tout, on ne nous en dit pas plus.